Depuis la nuit des temps, les critères d’esthétisme existent et ils n’en finissent pas de disqualifier des physiques au détriment d’autres. Dans l’antiquité, Gisèle Bündchen n’aurait « pas passé le casting », de quoi relativiser. Ne donnons pas à la mode un rôle qu’elle n’a jamais eu, elle est comme un art, aussi subjectif que l’est la notion du beau. Dès lors, sa diabolisation, sa censure est-elle pertinente ? Ne revient-elle pas à infantiliser la femme qui ne saurait pas se protéger de son propre regard, incapable de différencier une image du réel ? Quel beau message ! La presse féminine ainsi tout en se donnant bonne conscience au travers de propos autocritiques et alarmistes ne cesse pas pour autant de nous nourrir d’injonctions paradoxales. Et si c’était à nous de faire la part des choses ?
Il y a mode et mode, la suivre à n’importe quel prix jusqu’à en être ridicule, se complexer et mettre sa santé en danger, par pitié non ! Plutôt s’en inspirer pour capter l’air du temps et oser le jeu de se l’approprier quel que soit notre physique. S’intéresser à la mode, plus que de vouloir ressembler à un canon de beauté, c’est surtout s’intéresser à son époque, une manière d’y adhérer ou de s’y opposer.
Précisons-le, admirer l’harmonie des couleurs, la coupe de vêtements, leurs matières, leurs possibles associations, cet intérêt n’a jamais eu la prétention de rivaliser avec les grandes missions scientifiques ni d’impacter les conflits mondiaux ou encore les crises économiques. La mode, vécue comme art personnalisé peut simplement contribuer à donner à notre existence, un peu plus de saveur, d’en proposer une interprétation comme on choisit de se soumettre à un exercice de style sans pour autant en changer le sens.
Est-ce bien utile me direz-vous ? L’esthétisme vestimentaire est dans notre région amalgamée à la sphère du superficiel, également stigmatisée négativement. Pourtant, nous faire croire que nous ne vivons pas dans un monde d’images est aussi hypocrite que dangereux. Sans autres statistiques, j’affirme qu’au jour d’aujourd’hui, une femme qui prend soin d’elle se sent mieux que celle qui se néglige, pour autant qu’elle soit bien dans sa peau, qu’un appartement bien décoré peut influencer la vie de ceux qui y vivent, si tant est que ces derniers soient prédisposés à s’y épanouir, qu’un plat délicieux le sera encore plus si sa présentation est soignée.
Il ne faut pas avoir honte de ces plaisirs futiles qui ne font rien d’autre que de pimenter nos réalités, de les séduire un tant soit peu. Le superficiel a une fonction d’évasion et d’expression qu’il ne faut pas négliger. Sans donner à l’image esthétique la potentialité de remplacer le réel, elle doit contribuer à la rendre plus acceptable et non à la rendre insupportable comme le sous-tendent les infantilisants de la presse féminine. Parce que la mode, en tant qu’expression d’un style choisi, nous donne tout simplement l’occasion d’apprivoiser cette réalité parfois cruelle. Il est 7 heures du matin et je vais prendre mon train, il fait nuit, il pleut à torrents. Sur le quai, foule grise et compacte, tristes mines, stress palpable, visages fatigués, déprimés. Résister, ne pas céder. Imposer un peu de couleur à ce quotidien, choisir de porter un manteau jaune vif et de l’assortir à mon humeur.
Mode de vie quand tu nous tiens !
Par Zenia B.
Photographie par Zuzanna Adamczewska-Bolle, robe : http://www.dressbox.ch/
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