Entretien avec Dietmar Haller: « Ma source d’inspiration émane de mon Etre »

29 juillet 2019

COTE NEWS Dietmar Haller, nous sommes à Saint-Cergue (Vaud) dans votre atelier au milieu de vos toiles. D’où vient votre peinture ?

Dietmar Haller  Les phases de création arrivent comme ça. Ma peinture est purement instinctive. Difficile dans ces conditions de l’expliquer intellectuellement. Elle est le reflet de mon existence et de moi-même. Elle est ma vie. Je suis autodidacte. J’ai commencé très jeune à peindre et je n’ai jamais arrêté. C’est un besoin à la fois vital et viscéral. Je m’enferme dans mon atelier pendant parfois une semaine et je jette sur la toile ce que j’ai dans le ventre. Tout à coup, je sors avec vingt ou trente tableaux. J’utilise la peinture, la sérigraphie, des tissus, différents collages… J’assemble des matériaux, je superpose les couches. Il m’arrive de travailler une toile sur plusieurs mois. Il m’arrive même d’en reprendre au bout de plusieurs années.

Dietmar Haller

COTE NEWS  Comment tout a commencé ?

Dietmar Haller  J’ai peint sans rien montrer pendant au moins vingt ans. Toutes ces années, je suis resté caché dans l’obscurité. Comme gamin, j’ai toujours griffonné, puis plus tard j’ai consciemment choisi de peindre. Au début, je suis arrivé à Genève pour travailler dans un bureau. Dans la foulée, j’ai déménagé dans un petit appartement où je peignais sur la terrasse et dans la cave. J’avais beaucoup de mal à gérer le quotidien et à rentrer dans le cadre professionnel. Ma future femme m’a trouvé un atelier dans une ancienne usine de meubles à Nyon. Dans ce lieu, j’ai vraiment pu donner libre cours à ma créativité. Peindre et travailler en même temps annihilaient les fruits de l’une et de l’autre de mes activités. J’ai fini par sortir du cadre du bureau pour me consacrer entièrement à mon œuvre.

COTE NEWS  Quelles sont vos sources d’inspiration lorsque vous peignez ?

Dietmar Haller  Ma plus grande source d’inspiration était Jean-Michel Basquiat, surtout au début de ma carrière. J’écoute des vieux tubes, je joue un peu de mon instrument de musique et je vois des images. L’inspiration n’est pas forcément que visuelle. Je ne pense à rien et j’attaque la toile. Il n’y a rien à comprendre dans mon travail. Comme je l’ai indiqué précédemment, ma source d’inspiration émane de mon Etre, et tout ce que je projette sur la toile est inspiré de mon existence.

Dietmar Haller 

COTE NEWS  Quelle est la place réservée à la vie privée dans votre art ?

Dietmar Haller  J’ai trouvé un équilibre dans ma vie privée grâce à mon épouse. Depuis peu, elle s’occupe de ma promotion. Elle est mon moteur. Nous sommes une bonne équipe. Notre entente est créatrice et complémentaire. Grâce à elle, je peux me laisser entièrement aller à mon art, corps et âme, et tout donner sur la toile.

COTE NEWS  Vous semblez peindre d’une manière très naturelle, comment créez-vous ?

Dietmar Haller  Chez moi la création se déroule en phases ; je peux m’enfermer des jours dans mon atelier, me couper du monde et produire beaucoup de toiles. Et puis, j’ai besoin de phases où je vis afin d’y puiser mon inspiration. Finalement, la peinture c’est un appel ponctuel et urgent. Je voyage un peu. Mais le rêve du voyage, d’un au-delà est peut-être plus important que le voyage lui-même ?

COTE NEWS  Vos toiles sont expressives et parfois violentes, certaines sont également empreintes d’une forme de sérénité. Etes-vous un être tourmenté ou en paix ?

Dietmar Haller  Je ne suis jamais calme à l’intérieur. Ma peinture reflète mon caractère. Comme vous pouvez l’observer, il n’y a pas de surface plane. Mon esprit n’est pas structuré. Le tourment est mon moteur. Quand j’ouvre la porte de mon atelier, je rentre dans mon monde. Je mets de la musique à fond et je m’attèle à la tâche. Je commence, mais qui peut dire où la toile s’arrête ? Et puis, d’un coup, je le sens et c’est terminé. Je fais abstractions des bruits extérieurs, je suis libre de donner vie à mon œuvre. Certes, le tourment est ce que je recherche et est l’état dans lequel je me mets pour travailler et créer.

COTE NEWS  Est-ce que l’art peut s’apparenter à une forme de psychothérapie ? Une sorte de dialogue avec soi-même qui grandit et guérit l’artiste ?

Dietmar Haller  Pour ma part, il est certain que l’art représente plus qu’une psychothérapie ; c’est une sorte d’exutoire vital. Je suis en retrait par rapport à mon travail. Cependant, je pense que la modestie est aussi une forme d’égocentrisme. Si je n’avais pas été peintre, j’aurais été musicien. J’ai beaucoup joué étant jeune. Quand je peins, j’assemble les éléments qui me viennent naturellement de l’intérieur. Cela vient au départ de mon subconscient. Mais j’observe aussi beaucoup et je développe ma propre histoire après mon premier réflexe créatif.

COTE NEWS  Quelle est la place de l’art aujourd’hui en Suisse ?

Dietmar Haller  Je trouve hélas que l’on ne donne pas assez d’importance à l’art en Suisse, malgré la plus grande foire du monde d’art à Bâle. Mais en tant que Bâlois je dirais que Bâle fait exception à la règle puisque l’art est très présent dans cette ville. En Suisse romande, l’art manque un peu de vivacité. La Suisse est une plaque tournante de l’art, surtout pour des artistes établis, mais il reste difficile de percer. Ce pays est un bon biotope pour un artiste, mais c’est comme partout ailleurs ; le prophète n’est rien chez lui. C’est une loi universelle. Il faut savoir être patient, partir pour mieux revenir et beaucoup travailler.

COTE NEWS  Quelle est votre philosophie de vie ?

Dietmar Haller  La Vie, la Peinture, la plongée sous-marine et le Rock’n Roll.

Plus d’infos: www.dietmarhaller.com

Interview réalisée par Nicolas-Emilien Rozeau

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