Voyez-vous, j’ai eu la visite de ma chère filleule. À trois ans, Miss Loulou est rapidement devenue ma meilleure complice de tous les jeux et blagues possibles et imaginables. Elle me réserve ses plus grands fous-rires, et m’emmène dans ses danses endiablées au son du Livre de la Jungle… À chacune de nos rencontres, elle m’attend en piétinant d’impatience, la bouche remplie d’histoires à me raconter et de questions à me poser, les yeux brillants de curiosité quant à la prochaine aventure dans laquelle nous allons nous lancer toutes les deux.
Qu’il semble loin, le jour où, me déposant dans les bras cette petite blondinette, son père m’annonça que j’avais été choisie comme marraine. Paf, comme ça, sans prévenir. Je n’en revenais pas, et me demandais déjà comment j’allais bien pouvoir être à la hauteur des attentes de ces jeunes parents qui, visiblement, avaient fait erreur sur la personne ! C’était certain : tout d’abord, je n’ai aucun, mais vraiment aucun enfant encore, pas même un qui serait arrivé à mon insu et se cacherait derrière le canapé depuis un an ou deux. Ensuite, dans ma petite tête d’alouette, je m’imaginais que le rôle de marraine était super important, dans le sens sérieux quoi… On pourrait tout à fait me demander de servir de tutelle à cette enfant au cas où la tragédie frapperait à la porte. Puis, on s’attendrait certainement à ce que je serve, même un tout petit peu, d’exemple à la blondinette en question. Comment ces parents avaient-ils pu être inconscients au point de me faire confiance, moi qui crois toujours à l’existence des fées et des lutins des bois ?!
Mais voilà, chers lecteurs, que j’ai découvert la beauté du rôle des parrains et des marraines : dans mes recherches intensives, je ne faisais qu’arriver à la même conclusion. Comme les fonctions de parrains et marraines se sont modernisées, et les frontières de la famille un peu élargies avec le temps, les oncles, tantes, amis ou amies de la famille qui acceptent la charge de parrainer un enfant jouent « le rôle qu’ils veulent bien se donner ». Quelle formidable invention ! Tout à coup, nous sommes donc dans la position enviable de pouvoir gâter, chouchouter un enfant, lui faire voir des horizons nouveaux que ses parents n’auraient peut-être pas pensé à lui ouvrir, le faire rire et le conseiller, l’air de rien, dans les petites et grandes décisions de sa vie. En somme, cela ressemble aux meilleurs côtés du fait d’être un parent, sans les inconvénients !
À notre époque, les grands-parents sont nombreux à se déclarer si heureux de pouvoir enfin profiter d’une relation avec leurs petits-enfants sans les contraintes ou la pression morale de devoir assumer un rôle d’éducateur. Ils sont plus calmes qu’avec leurs enfants quelques années auparavant, moins anxieux aussi… Les parrains et marraines font peut-être moins parler d’eux, mais ils appartiennent eux aussi à cette catégorie bénie de gens pour qui les visites des enfants ne représentent que de la joie, sans aucun stress.
Ce week-end, alors que ma filleule et moi écoutions avec attention l’histoire de Cendrillon et qu’arrivait l’épisode du changement de citrouille en carrosse par la bonne fée, sa marraine, Miss Loulou s’est retournée vers moi, toute surprise, les yeux presque éblouis. « Les marraines, c’est des bonnes fées ?? » Ah, je ne suis pas sûre de vouloir lui enlever cette illusion-là de la tête avant encore un an ou deux… voire quinze !
A. Louette – Rédactrice TRIBUNES ROMANDES
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