Les phénomènes migratoires, un défi pour l’éducation au 21ème siècle

24 juillet 2019

Les caractéristiques démographiques, économiques et du marché de l’emploi, mises en lumière par le  Rapport 2011 de l’OIM sur l’état de la migration dans le monde, le confirment. L’histoire de l’humanité est ainsi jalonnée d’une succession de mouvements : explorations, conquêtes de territoires, adaptations aux changements climatiques, accès aux ressources, fuites devant des catastrophes, lesquels sont si révélateurs de notre nature qu’ils ont été érigés en droit dans la Convention internationale sur les droits des migrants (art. 8-1).

 

Or si la migration est un droit humain et un moteur du développement, ce droit peut se heurter au cadre des institutions des pays d’accueil et à la cohabitation interculturelle qui en résulte. En effet, l’arrivée de populations nouvelles sur un territoire peut provoquer des dissensions, des tensions sources de conflits. Les phénomènes migratoires deviennent de ce fait un défi pour l’éducation. Il est ainsi prouvé que les enfants de migrants ont moins accès à l’éducation que les autres, connaissent plus de difficultés à achever une année complète d’études et apprennent dans des conditions de moins bonne qualité que les autres enfants. Dès lors, pour que la migration se transforme en force de développement, l’information, la formation, l’éducation des populations migrantes comme des populations d’accueil s’avèrent essentielles. Dans cette logique, certaines ONG soutiennent la formation des travailleurs migrants et permettent à leurs enfants de suivre une scolarité adaptée à leurs besoins.

Au Mali, les migrations sont des phénomènes complexes et très imbriqués les uns dans les autres. Les modes migratoires internes sont entre autres conditionnés par la coexistence de populations nomades et paysannes. La mobilité sert ainsi de marqueur identitaire ethnique chez les populations itinérantes de Mopti, mais le taux de scolarisation de ce peuple nomade est particulièrement faible par rapport à la moyenne nationale (20% contre 29,6% au niveau national). Cette disparité s’explique par le fait que les offres éducatives ne sont pas ou peu adaptées à un mode de vie itinérant. Pour encourager la scolarisation, l’école suit désormais les enfants  de tribus tamasheks, peuls et bozos. On les appelle les écoles mobiles ou écoles nomades. Le professeur accompagne les enfants sur les pirogues le long du fleuve Niger où se déroule la classe ou encore à dos de chameau avec une tente équipée de mobilier léger, démontable et facilement transportable ; une école, connectée à son milieu, qui permet à toute une génération d’accéder à l’instruction tout en préservant son mode de vie.

A 9’000 kilomètres de là, dans l’état d’Orissa à l’est de l’Inde, des milliers de travailleurs sont forcés de migrer vers le sud pour survivre. Souvent très endettés, ils sont attirés par les promesses de bons salaires et de repas quotidiens. Pour que leurs enfants ne soient pas déphasés à leur arrivée dans l’état du Tamil Nadu, les équipes de l’ONG Aide et Action ont installé des écoles relais ; une offre scolaire qui s’adapte aux migrants et facilite leur intégration. Leur constat est sans appel, les établissements scolaires servent de rempart à l’exploitation des travailleurs et au travail des enfants. Depuis que ce projet a démarré en 2006, plus de 180 000 enfants privés d’éducation sont désormais pris en charge.

Cette réalité bien qu’éloignée géographiquement de la nôtre, montre qu’offrir des alternatives éducatives adaptées aux phénomènes migratoires et valoriser l’interculturalité dans les pays d’accueil réduisent la vulnérabilité des migrants comme la réticence des habitants.

A. Pfister, Chargée de Communication pour Aide et Action Suisse

 

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